Let me in i'll bury the pain // PV : Saemitsu.

Il est extrêmement rare que Yukimura Sôma fasse autre chose que d’avoir le nez dans ses pages de cours illisibles, annotées dans tous les sens, aux feuillets numérotés selon une logique qui n’appartient qu’à lui. Et quand il le fait, c’est souvent pour fumer une cigarette d’un air absent, en s’amusant à ignorer complètement les paroles qui pourraient lui être adressées. Avant, quand il habitait tout seul, il ne risquait pas d’être dérangé. Maintenant qu’il a accepté le squat de Namie et Saemitsu, deux de ses cousins, c’est sûr que c’est plus animé… Quelque part, ça l’ennuie parce que ça le force à faire attention à autre chose que lui-même et ses propres malheurs, et puis d’un autre côté, ça le contraint à des relations sociales et c’est pas plus mal. A vrai dire, il ne sait pas trop pourquoi la jeune Namie a préféré venir habiter avec lui, grand cousin taciturne et trop mûr pour son âge, qui se sait peu apprécié parmi les plus jeunes des maudits, plutôt qu'avec ses parents. Il n'essaie pas non plus de le découvrir, estimant que ça relève de la vie privée de la jeune fille, et que tant qu'elle ne casse rien chez lui, tout va bien. Quant à Saemitsu, là, il comprend. Contrairement à son propre cas, les parents du Sanglier ne l'avaient jamais renié, même après une période de sa vie plutôt sombre et brumeuse – sur laquelle Yukimura avait toujours refusé d'écouter les ragots, détestant ce genre d'attitude de " bonne femme " – et de l'avis sec et tranché du cheval, ils auraient mieux fait. Finalement, il préférait autant avoir été littéralement abandonné plutôt que d'avoir des parents comme ceux du Sanglier, qui passaient leur temps à reprocher à leur fils son existence. Bref, autant dire que ce jour-là est un grand jour : c’est pas courant de voir Yukimura Sôma entrer dans le café Satou après avoir écrasé un mégot de cigarette au sol. Tout ça à cause de Saemitsu, qui lui a laissé un mot sur la table de la cuisine.

« Salut l’étudiant, t’es convoqué par ton génie de cousin au café Satou, ce midi, histoire qu’on mange ensemble ! A tout à l’heure, mocheté ! »

Saemitsu est aussi flamboyant que Yukimura est froid, et pourtant le cheval ne peut pas vraiment s’empêcher de l’apprécier, lui et sa vision très particulière de la malédiction. Et le cheval n'a même pas pensé à s'indigner des surnoms pour le moins enlevés que lui a donné son cousin... Quoique, mocheté, non mais il s'est regardé ? Et malgré son caractère très peu enclin à se plier à ce genre de futilités, Yukimura ne peut pas s'empêcher d'en sourire. Quelle nuisance, ce Saemitsu quand même. Le grand brun pousse la porte d’entrée vitrée du café, cherchant des yeux une tête connue dans le monde présent. Il est habillé assez sobrement d’un jeans de couleur claire, d’un pull noir avec une chemise portée en dessous, dont les manches et le col dépassent du pull. Le sac qu’il utilise pour ses côtés porté en bandoulière trahit clairement d’où il revient : la fac. Il y est passé pour imprimer quelques définitions à la bibliothèque, bien qu’il n’ait pas cours aujourd’hui… Trop zélé, le maudit, beaucoup trop zélé. Les yeux couleur brouillard repèrent assez vite le cousin dans la foule, et il s’avance vers lui, expression grave au visage.

« Salut Mitsu… »

Il est de ceux qui préfèrent le surnommer ainsi. Même si personnellement, il a horreur qu’on l’appelle Yuki – chose qui est assez secrète, puisqu’il ne le dit jamais. Il pose d’abord son sac, défroisse son pull d’un revers de main, et pose le regard sur son cousin en s’asseyant. Malgré son caractère renfermé, il semble plutôt… satisfait d’être ici en présence du Sanglier, et chez lui c’est vraiment quelque chose d’exceptionnel. Néanmoins, il a peut-être l'air moins fermé qu'à l'accoutumée, mais il n'y a aucune trace de joie sur le visage aux traits racés et bien dessinés : on parle du sociopathe maudit du cheval, là. Yukimura jette un court regard autour de lui, chassant de la main les mèches de cheveux noires égarées devant ses yeux.

« J’ai apporté de quoi payer, je me suis dit qu’il était très possible que tu aies complètement oublié ce détail. »

Le regard à l’expression calme se pose alors sur l’ardent Saemitsu, le cheval semblant se demander pourquoi il l’a appelé ce midi. C’est vrai quoi, il pourrait tout aussi bien demander à un autre des petits cousins, beaucoup plus aimables et ouverts à la conversation que lui. Une lueur de compréhension passe dans les yeux de Yukimura.

« Tu veux me parler de problèmes de santé ? »

Auquel cas il est tout ouïe, menton appuyé sur ses mains croisées. Il a un besoin assez bizarre de justifier la demande de Saemitsu de manger avec lui ce midi, comme si son cousin ne pouvait tout simplement pas avoir envie de passer du temps avec lui sans que ce soit intéressé. Du coin de l'oeil, il surveille l'arrivée du serveur, attentif et silencieux.

[ HJ : Le titre n'a absolument rien à voir avec le reste. S'il y a quelque chose qui ne te va pas, pm et j'éditerai ! ]